A. Di Crollalanza 8 VENDREDI 3 SEPTEMBRE 2021 « Il ne faut pas parler à l’enfant, mais avec lui » Dans un livre qu’il vient de publier, l’auteur Florent de Bodman insiste sur l’importance de converser avec son bébé dès la naissance « E Oihana Gabriel n 2022, ayons l’audace de miser sur les bébés. » Alors que la présidentielle approche, il est un sujet dont on parle peu. Et que Florent de Bodman espère mettre en lumière : l’incroyable potentiel des tout-petits. Cet énarque, qui dirige l’association 1 001mots et aide des parents d’enfants âgés de 0 à 3 ans, vient de publier À portée de mots, parler avec son bébé peut changer sa vie (éd. Autrement). « Parler à son bébé peut changer sa vie », dites-vous. Vraiment ? J’en suis convaincu. Une étude américaine a beaucoup compté dans mon engagement dans la petite enfance. Dans les années 1970, des chercheurs ont créé une crèche pilote où l’on parlait beaucoup aux enfants âgés entre 0 et 5 ans. On observe que les enfants passés par cette crèche ont deux fois plus de chances d’apprendre à lire, de faire des études supérieures et deux fois moins de risques d’être au chômage… C’est une démonstration rigoureuse : donner un environnement favorable aux tout-petits peut avoir des bénéfices pour toute la vie ! Les inégalités commencent donc avant l’entrée en maternelle ? Tout à fait. Une autre étude américaine, qui date de 2003, a comparé Emmanuel Macron a annoncé jeudi soir quatre « ambitions » pour Marseille. G. Horcajuelo/AFP e ACTUALITÉ le niveau de vocabulaire à 3 ans. Des enfants de familles aisées maîtrisaient 1000 mots, contre 500 pour ceux de familles défavorisées. Une des explications, c’est que des parents qui ont fait des études et ont des ressources font en moyenne davantage la conversation à leurs enfants. Pourtant, parler à son bébé n’est pas évident pour tous… J’ai souvent rencontré des pères qui pensent qu’un bébé de 6 mois ne comprend pas ce qu’on lui dit. En ce qui concerne les livres, pas mal de parents n’ont pas l’idée que ça peut intéresser un tout-petit. Or les linguistes « À 1 an, un enfant comprend 80 mots différents alors qu’il ne parle pas. » expliquent que les capacités de compréhension sont bien en avance sur le langage. À 1 an, un enfant comprend 80 mots différents alors qu’il ne parle pas. Les neurosciences montrent de plus en plus que la petite enfance est une période extraordinaire pour l’apprentissage. Un enfant de 2 ans a deux fois plus de connexions neuronales qu’un adulte ! Quels conseils donnez-vous pour susciter la curiosité de l’enfant ? Il ne faut pas parler à l’enfant, mais avec lui. Les orthophonistes avec qui je travaille insistent sur l’importance de s’adresser à lui, se mettre à sa hauteur, le regarder dans les yeux. On peut essayer d’avoir un dialogue en choisissant des questions ouvertes. Par exemple, au lieu de dire « est-ce que tu veux manger ? », qui appelle un oui ou non, on va préférer « à quoi est-ce que tu voudrais jouer ? » Et attendre cinq secondes pour voir s’il y a une réponse. L’enfant peut sourire, faire un geste, puis des mots. Macron est venu, a vu… et reviendra À Marseille, Alexandre Vella Le chef de l’État a conclu sa tournée des sujets marseillais, jeudi, par un discours au palais du Pharo, où il a énoncé quatre « ambitions » chiffrées à 1,5 milliard d’euros, en plus des mesures relatives à « l’urgence sécurité » (un hôtel de police, 500 caméras…) « sociale » et « sanitaire » (170 millions d’euros pour les hôpitaux »). Pour les écoles, « une société ad hoc présidée par le maire et sous le contrôle de l’État » sera créée « d’ici à la fin de l’année ». Avec « l’objectif de reconstruction des écoles identifiées comme les plus délabrées », soit Un environnement favorable aux tout-petits peut avoir des bénéfices à long terme. Superstock/Sipa Le regard sur la petite enfance est-il en train de changer ? Petit à petit, mais on revient de loin. La question des bébés reste pour beaucoup une « histoire de bonnes femmes ». J’ai fait mes études à l’ENA et travaillé au ministère des Finances. Autant dire que les bébés, ce n’était pas du tout un sujet important là-bas. Justement, vous espérez que la campagne présidentielle de 2022 prendra à bras-le-corps ce sujet. Quelles sont vos priorités ? J’en vois trois. La première : créer 200 000 places de crèche d’ici à environ 175. Une ambition éducative couplée à l’expérimentation de la liberté de recrutement pour les directeurs d’établissement. Deuxième ambition : « un carrefour de l’entrepreneuriat », lieu pour accompagner les jeunes qui voudraient monter leur société, sera établi. Sur le plan culturel, Emmanuel Macron imagine « un grand studio de la Méditerranée » et l’installation d’écoles spécialisées dans l’audiovisuel. Enfin, les contours d’une fondation pour la recherche et la protection de l’environnement du Bassin méditerranéen ont été dessinés. Le président a prévenu qu’il reviendrait mioctobre puis en février, pour constater l’avancement de ces projets. -in C u SECONDES 2" u dix ans, en particulier dans les zones qui en manquent, banlieues et zones rurales, sachant qu’il en existe 400 000 actuellement. La deuxième chose, c’est que les salaires des professionnelles soient augmentés. On ne peut pas leur demander d’avoir une pédagogie riche et les payer au smic. Enfin, il faudrait faire un effort d’investissements pour aider les parents à être parents. En moyenne, un enfant passe 80% de son temps avec eux. Or l’État dépense 30 milliards par an pour proposer des modes de garde… et 200 fois moins pour accompagner les parents. 2 120 soit le nombre de naissances en moyenne par jour en France en juillet. Les naissances reviennent ainsi à leur niveau de 2020. Neuf mois après le début du premier confinement, les naissances avaient fortement baissé en France : – 7% en décembre 2020 par rapport à décembre 2019, puis – 13% en janvier 2021 par rapport à janvier 2020. (Source : Insee) |