10 VENDREDI 9 JUILLET 2021 Mikros, superhéros né dans les années 1980. Jean-Yves Mitton Pio Marmaï à la poursuite des quidams survoltés 7 Caroline Vié Il est parfaitement à son aise au milieu de partenaires aussi convaincants que lui. Pio Marmaï incarne un policier au passé chargé dans Comment je suis devenu super-héros. Ce premier film français de superhéros et d’aventures fantastiques, qui réunit Leïla Bekhti, Vimala Pons, SwannArlaud et Benoît Poelvoorde, a été montré au festival de Deauville et devait sortir en salles, avant d’être finalement programmé directement sur Netflix ce vendredi. L’histoire se déroule dans un monde où les superhéros se sont intégrés à la population. Des trafiquants d’une drogue CULTURE Superhéros du terroir français La sortie de Comment je suis devenu superhéros, sur Netflix, ce vendredi, nous rappelle que ces personnages existent bel et bien en France, et depuis longtemps Vincent Julé L es superhéros, c’est pas dans la culture française. » Combien de fois cette phrase a pu être prononcée, avec ses variantes sur le cinéma de genre et la sciencefiction. Or, cela ne peut pas être plus faux. Les superhéros français ne se limitent pas à Superdupont, comme le prouve la sortie du film Comment je suis devenu super-héros, ce vendredi sur Netflix (lire ci-dessous). Xavier Fournier ne dira pas le contraire : il en a trouvé pas moins de 300 pour les besoins de ses livres Super-héros, une histoire française et Super-héros français, une anthologie, chez HuginnMuninn. Exemples. L’AMAZONE MASQUÉE, UNE VRAIE SUPERHÉROÏNE AU XIX e SIÈCLE. « Il y a un truc effarant, commence Xavier Fournier. Ce n’est ni une BD, ni un roman, mais, en 1867, Paris a vu une femme redoutable sèment la panique en donnant des pouvoirs terribles à des quidams incapables de les maîtriser. Comment fait-on pour arrêter un adolescent qui s’est transformé en véritable lance-flammes et qui se planque dans une supérette ? « Il y a un côté polar et film noir dans le film, explique Pio Marmaï. C’est rare de voir un cinéaste français s’attaquer de façon aussi originale au cinéma de genre. L’ambition de Comment je suis devenu super-héros m’a bluffé. » L’acteur incarne un policier au passé chargé. Netflix ru masquée parcourir la ville à cheval. Des témoins la décrivent même armée de sabres. Le Figaro et d’autres journaux de l’époque lui ont couru après pendant un an et demi, pour savoir qui se cachait derrière l’Amazone masquée. Un phénomène médiatique à la Jack l’Éventreur. » Vingt ans plus tôt, Alexandre Dumas commençait la publication du feuilleton Le Comte de Monte-Cristo, « le grand-père de tous les grands-pères », selon le spécialiste. En effet, le roman s’est exporté aux États-Unis et, avec lui, la notion d’identité secrète, indissociable des superhéros et superhéroïnes. NYCTALOPE ET LE PREMIER UNIVERS PARTAGÉ EN 1911. Nyctalope, créé par Jean de La Hire en 1911, est souvent considéré comme le premier superhéros français, mais il s’agit surtout, selon Xavier Fournier, du premier univers partagé avec plusieurs personnages secondaires et une trentaine de romans : « Nyctalope est un héros qui, à la suite d’une tentative d’assassinat, a eu son cœur remplacé par un organe mécanique. Ses yeux, affectés, lui permettent de voir la nuit. Il est à la fois superhéros et explorateur, avec des aventures sur Mars, contre des hommes requins, etc. Mis en images, cela pourrait donner du pur Marvel. » Mais il est longtemps tombé dans l’oubli, et pour une bonne raison, Jean de La Hire est condamné pour collaboration à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. FANTAX, LE BATMAN FRANÇAIS DE 1946. Avec son costume noir et rouge iconique, Fantax, créé en 1946, fait penser à « une sorte de Batman de bande dessinée, résume Xavier Fournier. Tu sens l’influence des héros américains. Il est un peu comme Arsène Lupin, mais règle ça avec les poings. Ses auteurs, les Lyonnais Marcel Navarro et Pierre Mouchot, étaient très inspirés par le cinéma de Lino Ventura, tu as donc un peu un superhéros chez les Tontons flingueurs. Il fume sa clope de travers, peut arracher une tête à coups de pelle. » À noter que le scénariste Marcel Navarro est également derrière les éditions Lug, qui ont ramené les premiers superhéros Marvel en France, et même créé leurs propres héros dans la revue Mustang, à l’instar de Mikros ou Photonik dans les années 1980. L’acteur, qu’on a vu récemment en patient dans la série En thérapie, sur Arte, apporte une grande sensibilité à un personnage de héros encombré malgré lui par un passé douloureux. « C’était chouette de participer à une grosse production bourrée d’effets spéciaux comme celle-ci, surtout que Douglas Attal a aussi soigné la psychologie des personnages », précise Pio Marmaï. La maîtrise des scènes d’action Ce premier film surprend par sa maîtrise, tant dans les scènes d’action que dans les échanges entre les personnages. « Douglas n’a pas cherché à imiter les Américains, insiste le comédien. Il a apporté sa propre vision à un univers qu’on aurait pu croire rabâché. » C’est l’impression que ressent le spectateur en découvrant cet excellent divertissement, dont Pio Marmaï constitue un atout non négligeable. |