ru CINÉMA MERCREDI 23 JUIN 2021 16 Mais pourquoi Cruella est-elle aussi méchante ? L’héroïne de Disney n’a pas toujours été machiavélique. Sa mutation d’enfer fait l’objet d’un film à ne pas rater, en salles ce mercredi C Caroline Vié omment la dame de pique des 101 Dalmatiens, celle qui rêve d’un manteau en peau de toutous, est passée d’une adorable jeune fille à une figure emblématique des sorcières de chez Disney ? C’est ce qu’explique Cruella, le film de Craig Gillepsie. Le réalisateur de Moi, Tonya suit cette délicieuse débutante, alors qu’elle tente de s’imposer dans le milieu de la mode. Mais celle qui deviendra Cruella tombe sous la coupe d’une autre super « vilaine pas gentille », qui commence par la martyriser, mais qu’elle ne tarde pas à dépasser dans la méchanceté. Si Cruella est une réussite, c’est en grande partie dû au duo Emma Stone- Emma Thompson. Les deux comédiennes prennent un plaisir évident à rivaliser de vilenie. « Faire un film Disney sur deux méchantes était une gageure, avoue Craig Gillepsie. Mais j’ai eu carte blanche. La seule chose que je n’avais pas le droit de faire était de tuer des chiens ! » Emma Thompson impressionne dans la peau de la Baronne, patronne de choc qui malmène son entourage. Emma Stone séduit, elle, en arriviste qui se prépare à dépasser son modèle avec l’aide de ses deux sbires joués par Paul Walter Hauser et Joel Fry. Ajoutez une touche d’histoire familiale, des décors et des costumes dignes du Londres des années 1970 et Samir Guesmi tout en pudeur et en tendresse dans « Ibrahim » C.V. S amir Guesmi n’est pas seulement un grand comédien vu notamment chez Solveig Anspach, Nicole Garcia ou encore Hafzia Herzi. Il révèle de belles qualités de cinéaste avec Ibrahim, son premier long-métrage présenté sous le label Cannes 2020, en salles à partir de ce mercredi. Samir Guesmi se dirige lui-même dans le rôletitre, celui d’un homme discret et digne, écailler dans un quartier parisien chic. Son fils adolescent, incarné par Abdel Bendaher, qui fait d’impressionnants débuts à l’écran, est sur le point de sombrer dans la délinquance. C’est un drame pour ce monsieur qui ne veut pas d’histoires, mais qui va devoir gérer la situation. « Tous mes personnages sont confrontés crûment à la dureté de la vie », précise Samir Guesmi. Pour autant, ce beau film n’a rien de misérabiliste pour décrire la vie de « petites gens » avec une pudeur remarquable. Comme une caresse Rien ne va plus entre un homme mûr qui tente d’inculquer de bonnes valeurs à son rejeton et ce dernier, prêt à déraper en suivant un camarade. Samir Guesmi décrit cela sans insister, en laissant ses personnages occuper doucement l’écran dans un Paris merveilleusement mis en lumière par la cheffe-opératrice Cécile Bozon. « Ce qui manque à mes personnages, ce ne sont pas des discours, mais une caresse sur le visage », insiste Samir Guesmi. La scène finale, bouleversante à plus d’un titre, remédie à ce déficit de tendresse. Elle est emblématique de l’humanité qui nimbe cette œuvre révélant de belles qualités de mise en scène. Photo : Anne-Françoise Brillot/Le Pacte À VOIR AUSSI Le choix de Caro Le coup de cœur de notre journaliste s’est porté sur « Ibrahim ». Suspense au DanemarkC.V. vous obtenez une comédie vacharde réjouissante. Le Cruella de Craig Gillepsie rappellera aux cinéphiles Eve (1950), de JosephL. Mankiewicz, ou encore Le diable Attention, film sous haute tension. Présenté au festival du cinéma policier Reims Polar, en section « Sang Neuf », le film danois Shorta (qui veut dire « police », en arabe) plonge dans les méandres d’un drame haletant : un jeune homme meurt en garde à vue et des émeutes éclatent dans la banlieue de Copenhague. « Les jeunes sont en colère et se sentent diabolisés et incompris, et il en va de même pour les policiers agressés et s’habille en Prada (2006), de David Frankel. La cruauté de l’héroïne de Disney évoque, sous bien des aspects, celle de Meryl Streep, inoubliable dans le rôle d’une directrice de mode, tyrannique à l’égard de son assistante (Anne Hathaway). Un charme « vénéneux » « Les deux Emma ont été tout de suite complices pour créer ce duo de personnages hauts en couleur, se souvient Craig Gillepsie. La réussite dépendait largement de leur alchimie. » Si les deux actrices se partagent le haut de l’affiche de ce long-métrage, la plus jeune efface doucement l’aînée au fur et à mesure du récit, pour devenir celle qui sera incarnée plus tard par GlennClose dans l’adaptation en prises de vues réelles des 101 Dalmatiens. « Cruella est un film résolument axé sur des personnages de femmes fortes au charme vénéneux, déclare le réalisateur. J’espère que le public s’amusera à les détester. » Ce Cruella donne envie de retrouver très vite dans les salles cette icône de la méchanceté. Photo : Disney Entreprises sous-payés », expliquent les réalisateurs, Anders Olholm et Frederik Louis Hviid, dans le dossier de presse. La force de ce premier film est de démontrer que la violence est universelle. Il est impossible de ne pas penser à La Haine, de Mathieu Kassovitz, ou aux Misérables, de Ladj Ly, devant ce suspense brillamment mis en scène. Les rapports entre les policiers et le gamin qu’ils ont menotté pour avoir lancé un milk-shake sur leur voiture sont aussi crédibles que la fuite en avant de ces hommes traqués. Entre polar et film de guerre, Shorta trouve une dynamique qui met les nerfs à rude épreuve. « Notre but est de faire vibrer et de divertir, mais aussi de susciter des conversations sur un sujet difficile sans solutions claires », précisent les cinéastes. Photo : Alba Films |