P assions Vous musique êtes de jeunes organistes mais avec déjà un beau parcours. Comment êtes-vous venus à l’orgue ? MM : Je suis originaire de Tournehemsur-la-Hem qui possède un très bel orgue du XVIII e siècle. Vers l’âge de sept ans j’ai découvert cet instrument fascinant. Je suis entré dans la classe d’orgue de François Bocquelet à l’Ecole de musique de Saint-Omer puis au Conservatoire de Reims. Après le bac, j’ai décidé d’en faire mon métier. Je suis entré au Conservatoire National Supérieur de Paris (CNSM). En 2006, j’ai eu la chance de passer une année au Japon en tant qu’organiste en résidence à Saporo, au Japon. Là-bas, j’ai donné de nombreux concerts à travers tout le pays. J’achève en ce moment ma formation en pédagogie au CNSM de Paris. GL : Je suis issu d’une famille de musiciens. Enfant, j’accompagnais quotidiennement mon père qui tenait l’orgue cathédrale d’Arras. Je dessinais des buffets d’orgues... j’avais même un poster de l’orgue de Nielles-lès-Ardres dans ma chambre ! J’ai commencé par le piano et vers 14 ans je suis entré dans la classe d’orgue du Conservatoire de Lille. Après le bac, je suis parti aux Etats-Unis suivre des cours de piano, je suis ensuite entré dans la classe d’orgue du conservatoire de Lyon puis en écriture et pédagogie au CNSM de Paris. Comme Mathieu, j’ai passé une année à Saporo, au Japon. De l’invisible au visible 22 De Saporo au Japon à l’orgue du Touquet Sous ce nom mystérieux se cachent les « Trésors sacrés du littoral » C’est la prochaine exposition départementale organisée au Château musée de Boulogne-sur-Mer du 31 janvier au 18 mai 2009. Pourquoi exposer l’art sacré du littoral ? Après l’exposition organisée en 1992 au musée Sandelin à Saint-Omer présentant les trésors du patrimoine religieux et en 2000, l’exposition du patrimoine médiéval de l’Artois, au musée des Beaux-arts d’Arras, il restait à étudier le patrimoine du littoral ignoré du grand public et très largement méconnu des historiens. À travers la présentation d’environ 95 objets au château-musée de Boulogne-sur-Mer, un lieu fortement emblématique de l’identité locale, l’exposition tentera de définir les particularités culturelles de ce territoire. Alain Bouchardon est l’un des restaurateurs des œuvres d’art de cette exposition, en évoquant son métier il partage sa passion : Quelle formation avez-vous suivi pour ce métier souvent méconnu du grand public ? Originaire de Paris, j’ai suivi le cursus de l’Ecole des Beaux Arts, puis j’ai eu la chance de travailler dans l’atelier d’un restaurateur des musées nationaux et des Monuments Historiques. Puis, j’ai ouvert à Senlis mon propre atelier, ne sachant pas quel en serait l’avenir ; j’ai dispensé à mi-temps, en parallèle, des cours de peinture en tant que professeur de l’éducation nationale à des lycéens. Pendant une douzaine d’années j’ai travaillé pour le Château de Versailles afin de restaurer de multiples œuvres.…. Fort de cette expérience, j’œuvre depuis trente-cinq ans dans cet artisanat qui a évolué au niveau de son enseignement mais aussi des techniques employées. J’ai aujourd’hui trois salariés et nous restaurons des œuvres peintes quel que soit le support : bois, carton, papier etc… le plus grand tableau mesurait six mètres de hauteur. Je suis, par ailleurs, expert auprès de la Cour d’Amiens et suis parfois appelé à vérifier l’authenticité d’une œuvre. Quelles sont les étapes d’une restauration, les procédés utilisés, la déontologie à respecter par rapport à l’œuvre originelle ? Avant tout, le diagnostic s’impose, c’est la phase essentielle pour travailler correctement ; il faut d’une part évaluer la solidité et la fiabilité du support, ensuite s’intéresser à l’aspect esthétique de l’œuvre, lui rendre toute son âme sans jamais Ghislain Leroy (27 ans) et Matthieu Magnuzewski (28 ans) sont deux jeunes organistes originaires de notre région. Ils viennent d’être nommés co-titulaires du nouvel orgue du Touquet et ont participé à la dernière édition du festival des orgues du Pas-de-Calais, « Contrepoints 62 ». « ajouter » de nouveaux éléments. Nous avons d’ailleurs de plus en plus de procédés réversibles (colles, vernis) qui nous permettent le cas échant de retrouver si besoin est l’aspect original à tout moment. Les œuvres peintes notamment dans les églises constituent un patrimoine extraordinaire qu’il faut savoir préserver. Aujourd’hui, certaines églises chauffées ou encore d’autres toujours fermées et peu fréquentées offrent des variations de températures très peu propices à une bonne conservation… Pour cette exposition, je travaille avec plaisir à la restauration d’une très ancienne œuvre de l’église de Conchil-le- Temple nommée « la présentation de la Vierge au Temple ». J’ai même retrouvé la date de sa précédente restauration : 1857. Ainsi ce patrimoine traverse les siècles… Vous venez tous les deux d’être nommés co-titulaires du nouvel orgue du Touquet, qu’est-ce que cela implique ? GL : Nous avons été recrutés lors d’un concours présidé par Olivier Latry, titulaire de l’orgue de Notre-Dame de Paris et parrain de l’orgue du Touquet. MM : Nous assumons trois rôles : tout d’abord un rôle cultuel par l’accompagnement des offices religieux, un rôle culturel par l’organisation de concerts et un rôle pédagogique, notamment par l’ouverture prochaine d’une classe d’orgue. Avez-vous déjà un répertoire, des compositeurs ou un style de musique de prédilection ? MM : J’aime beaucoup la musique romantique allemande ou française, mais aussi le répertoire du classique français du XVIII e siècle. J’aime également le rapport entre musique et texte. Dernièrement j’ai donné un concert autour de Paul Claudel avec un récitant. GL : Je suis très attiré par la musique ancienne, notamment les compositeurs qui précèdent le grand Jean-Sébastien Bach. Et je suis sensible à la musique du XX e siècle ou encore à la musique contemporaine. exposition Vous êtes tous les deux originaires du Pas-de-Calais, êtes-vous attachés à ce territoire et en particulier à son patrimoine musical ? GL : Quand j’étais plus jeune, je feuilletais pendant des heures les inventaires des orgues du nord de la France. Chaque instrument a sa personnalité, son histoire et notre région offre des instruments tous très différents. Celui du Touquet comporte 37 jeux et permet de jouer un répertoire étendu. On n’aborde pas de la même manière un orgue romantique tel le Cavaillé-Coll de la cathédrale de Saint-Omer et un orgue baroque tel celui d’Auxi-le-Château. Cette personnalité propre à chaque instrument fait que le public se déplace non seulement pour écouter un organiste mais aussi un instrument. MM : Forcément, ma découverte de l’orgue est passée par la découverte d’un patrimoine, d’abord celui de mon village ou des orgues voisins comme Nielles-lès- Ardres ou Saint-Omer. J’étais émerveillé par le fait de mettre en branle cette vieille mécanique, ces vieux tuyaux. Le Pas-de-Calais possède un patrimoine instrumental de qualité, particulièrement riche et varié, un patrimoine qui s’enrichit encore d’orgues neufs ou restaurés. Il y a un passionnant travail à effectuer pour faire découvrir ce patrimoine au public, particulièrement aux jeunes générations. De l’invisible au visible Trésors sacrés du liTToral 31 janvier 2009 18 mai 2009 Château-musée de Boulogne-sur-Mer |