Naviguer, voguer, surfer, les mots aussi ont évolué avec le temps. « À la fin de la première moitié du XIX e siècle, l’espace fluvial n’est plus l’apanage des professions marinières », écrit Philippe Auclerc (Canotage et Belle plaisance en Loire de 1850 à 1910, revue 303*). « Au labeur se juxtaposent peu à peu des activités nautiques de loisirs, prélude au sport et à la compétition. » Les tendances ont glissé vers d’autres pratiques, les modes de propulsion pour se déplacer sur l’eau, avec un morceau de toile ou des rames, ont fait place au loisir avec le canotage et la plaisance, et à la recherche de performances. Ainsi est née la régate, ancêtre du yachting. La Loire-Atlantique s’est alors imposée très tôt comme un décor idéal, même si son fleuve, la Loire, « est cependant loin de présenter les mêmes avantages que la Marne ou la Seine : à la pratique de l’aviron, elle oppose la force du courant, et aux voiliers, le manque de profondeur », écrit encore Philippe Auclerc. * Revue 303 n°118, Le temps des vacances Du kite à 66 ans « Regarder naviguer un kitesurf glisser sur l’eau, c’est se demander comment personne n’y avait pensé auparavant. Pendant longtemps, on a tourné le dos aux progrès de l’architecture navale, aux matériaux et techniques, on pensait peut-être que l’on avait tout imaginé grâce à Jules Verne… » Et Jacques sait de quoi il parle. Il a longtemps pratiqué la voile, la planche à voile, avant de se mettre au kitesurf. À 66 ans, ce passionné d’océan originaire de La Bernerieen-Retz fréquente régulièrement quelques spots de la Loire-Atlantique, comme ce matin-là, lorsque nous l’avons rencontré, préparant son matériel, à Tharon plage. « Le plus difficile est souvent de faire simple. On a toujours pensé d’abord à une coque puis un mât, alors que pour avancer, le principe du cerf-volant, qui ne date pas d’hier, offre d’autres solutions. » La mine teintée de sel, cheveux au vent, l’homme s’amuse des virages que les sports nautiques ont pris. « Regardez l’allure de ces chars à voile, ils épousent parfaitement les plages du secteur. C’est magnifique de les voir jouer avec les bourrasques et se courber, comme un bateau pose sa joue sur l’eau. » S. Dacher Archives départementales 44 Histoires d’eau Les premières fêtes nautiques remontent au milieu du XIX e siècle, en même temps que l’apparition des sociétés nautiques, qui avaient déjà choisi la Maine, l’Erdre, la Sèvre nantaise et d’autres rivières au cours lent. Dès lors, raconte Philippe Auclerc, « les régates rythmeront la vie nantaise et auront de nombreux promoteurs comme MM. Polo, Lorois, Huette, les chantiers Dubigeon, Oriolle, et de sacrés yachtmen parmi lesquels MM. Suze, Levesque et Guillet (…) Dès 1850, des régates sont organisées à Nantes. Celles-ci essaimeront vite sur le littoral maritime : Paimbœuf, le lac de Grand-Lieu, Le Croisic, le Pouliguen ». Début XX e, le nautisme regarde vers le large, et il faudra attendre la fin du siècle dernier pour voir naître d’autres disciplines, une évolution importante des équipements et des enjeux sportifs. Les terrains de jeux ne sont plus tout à fait les mêmes. 100 ans de de sports en en exposition Certes, les sports nautiques sont évoqués dans l'exposition comme une activité pionnière de l'éveil aux sports. Mais c’est un regard bien plus large que proposent actuellement les Archives départementales : « Le visiteur est accueilli comme dans un café des sports, un lieu de rencontre et d’accueil où l’on retrouve la presse, notamment sportive… À partir de cet instant, on remonte le temps. » Cyril Bretaud, le scénographe de cette exposition, a imaginé un parcours à feuilleter comme une gazette des sports, de 1850 à 1950. Pourquoi cette période ? « Avant 1850, le sport était en général réservé à une élite aristocratique », révèle Samuel Boche, le commissaire de l’exposition. « C’est à partir de cette date que le sport s’est peu à peu démocratisé et modernisé. Pendant cent ans, le sport multiforme s’est mis en mouvement. » Il est devenu un fait social, qui passionne, mobilise et laisse peu d’indifférents sur la touche. ■■Exposition à voir jusqu’au 24 mars, aux Archives départementales, 6 rue de Bouillé, à Nantes. Entrée libre et gratuite, fermeture samedis, jours fériés et du 22 décembre au 1 er janvier 2013. Revivre un siècle de sports sur webdocs.loire-atlantique.fr/100ansdesports loire-atlantique• DÉCEMBRE 2012• le magazine du Département• 23