Portrait Je ne cesserai jamais d’être à Saint-Nazaire. Ici, tout est vrai et c’est ça qui me plait. P.Pascal Patrick Deville D’autres vies que la sienne Peste et choléra raconte la vie d’Alexandre Yersin, découvreur du bacille de la peste. Le succès de ce livre, le 10 e de Patrick Deville, est aussi contagieux qu’une épidémie. Jusqu’à contaminer le milieu littéraire qui en a fait un favori du Goncourt 2012. Le regard, d’un bleu tenace, renvoie à d’innombrables paysages, ceux que Patrick Deville a vus au gré de voyages incessants. Proche- Orient, Afrique équatoriale, Asie du Sud-Est, Amérique centrale, Caraïbes... « Je fais un tour et demi du monde par an ». Pour autant, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, Patrick Deville refuse l’appellation d’écrivain voyageur. Il n’écrit pas ses voyages, il voyage pour écrire. Il suit à la trace les héros de ses livres selon une méthode éprouvée : « Il y a d’abord le travail de recherche, en bibliothèque, il faut que je sache tout, puis je me déplace pour voir. J’ai besoin de sentir des odeurs, de voir des paysages. Le chalet de Yersin au Vietnam existe toujours par exemple ». Muni de son carnet en peau de taupe – traduction littérale de Moleskine, mole : taupe ; skin : peau –, Deville raconte les Vies des autres. « Les chats n’écrivent pas des chiens. » Les héros de Deville voyagent, ils sont aventuriers, explorateurs, découvreurs. Et toutes ces vies passent par une date qui fascine l’auteur : « 1860, c’est le Second Empire, la deuxième révolution industrielle, l’année où Pasteur démontre qu’il n’y a pas de génération spontanée, c’est aussi l’année de la création de Saint- Nazaire. » Nous y voilà, de ruisseau la parole de Patrick Deville devient fleuve. Il s’agit d’évoquer son port d’attache. « Je ne cesserai jamais d’être à Saint-Nazaire. Ici, tout est vrai, ce port fonctionne. Quand les navires entrent dans le port, jettent les haussières, qu’il y a des remorqueurs, ce n’est pas le syndicat d’initiative qui organise. C’est du travail. Il y a un risque de muséification en France, mais ici c’est vrai et c’est ça qui me plait ». 4• loire-atlantique• noVeMBre 2012• le Magazine du départeMent |