[38] Isère magazine n°133 fév/mar 2013
[38] Isère magazine n°133 fév/mar 2013
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°133 de fév/mar 2013

  • Périodicité : bimestriel

  • Editeur : Conseil Général de l'Isère

  • Format : (230 x 299) mm

  • Nombre de pages : 48

  • Taille du fichier PDF : 19,4 Mo

  • Dans ce numéro : cette maladie qui nous bouleverse, Alzheimer.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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ledossier d’Isère Magazine ALZHEIMER s La dure épreuve des aidants La maladie de leur parent ou conjoint a bousculé tous leurs repères. Ils racontent. » Témoignage « Ce n’est plus l’homme que j’ai épousé » Eugénia, 74 ans, et Séraphin, 78 ans, habitent à Bourgoin-Jallieu. Il y a quatre ans, Séraphin a été diagnostiqué malade d’Alzheimer. Depuis, ils affrontent ensemble cette maladie, qui a bouleversé leur vie. M. Giraud « T out a commencé par des changements d’habitudes : ma mère n’avait plus envie d’inviter la famille chez elle, ses repas étaient simplifiés, son jardin moins bien entretenu… Des occupations qu’elle aimait pourtant. Puis, elle a commencé à mettre des petits papiers de partout pour se souvenir des choses. Quand on lui posait une question, ses réponses devenaient imprécises ou décalées. Alors on l’a emmenée chez un neurologue. Le diagnostic a été comme un tsunami dans nos vies ! Tout d’un coup, on se retrouve sans repères, avec plein de questions et la peur d’une maladie qu’on connaît mal. Il a fallu s’organiser pour ses repas, sa toilette, son ménage… Tous ces petits gestes de la vie quotidienne, qui deviennent compliqués. Grâce aux aides à domicile et à la présence de mon frère et ma belle-sœur, qui habitaient et travaillaient juste à côté, ma mère a pu rester chez elle pendant cinq ans. Moi, j’allais lui faire sa toilette le dimanche. C’est très dur pour un fils de devoir s’occuper de sa mère comme de son enfant. Et aider un malade d’Alzheimer, ce n’est pas inné. Personnellement, j’ai beaucoup appris grâce à un groupe de parole, avec d’autres aidants. Ce qui est difficile avec cette maladie, c’est qu’il n’y a pas de progrès possible. Quand j’allais la voir chez elle et que je sortais de la pièce un instant, quand je revenais, elle me disait « bonjour » et avait oublié tout ce que je venais de lui raconter. Chez elle, les derniers temps, elle était très angoissée d’être seule et se levait la nuit. Nous étions très inquiets et ne pouvions pas la surveiller 24 heures sur 24, alors nous avons décidé de la faire entrer dans une structure adaptée. C’était terrible, j’avais l’impression d’abandonner un enfant ! Mais elle s’y sent en sécurité. Aujourd’hui, elle n’est plus capable de dire mon prénom. Parfois, elle me reconnaît, parfois non. Mais nous arrivons encore à partager des petits moments de vie. On regarde des photos ensemble, je lui parle de sa vie passée et lui raconte la mienne… Elle m’écoute, réagit par moment. Il faut se contenter de peu. Mais pour moi, l’essentiel c’est qu’elle sente qu’on est toujours là. » « de « M on mari s’occupait des papiers, du jardin, prenait les initiatives… Il avait un caractère latin, un peu macho, et décidait pratiquement de tout. Aujourd’hui, ce n’est plus l’homme que j’ai épousé », raconte Eugénia, les larmes aux yeux. À côté, Séraphin écoute. À certains moments, il semble perdu dans ses pensées. À d’autres moments, lucide, il participe à la conversation. Il a du mal à parler. Sa voix est enrouée, il cherche ses mots, marque des pauses entre chaque phrase et parfois perd son idée avant d’avoir fini de s’exprimer. « Je suis démoralisé car je ne peux plus rien faire », dit-il. Chaque jour, Eugénia doit l’aider à s’habiller, se laver… « Tout est devenu compliqué pour lui : enfiler ses chaussures, mettre du dentifrice sur la brosse à dent… Je dois l’assister en permanence. Je joue le rôle d’une infirmière, d’une mère, d’une aide à domicile, mais pas celui d’une épouse. C’est fatiguant et sur le plan affectif, c’est très dur. » Pourtant, Eugénia reste courageuse et dynamique : « Je le booste, je le pousse à faire les choses. Cela le maintient. » Deux fois par semaine, elle l’emmène dans un accueil de jour. « Au début, il ne voulait pas y aller. Aujourd’hui, c’est l’endroit où il se sent le mieux. » Et Séraphin ajoute : « Je me suis adapté, maintenant ça me plaît. Je suis au contact des malades et je participe. » « Parfois, il croit faire partie du personnel médical, commente Eugénia, mais les activités et le contact au groupe lui font du bien. » Ancienne éducatrice spécialisée pour adultes handicapés, Eugénia est mieux armée que la plupart des aidants face à la maladie. « Malgré tout, j’ai du mal à accepter ce que mon mari est devenu. Parfois, je m’énerve ou lui demande des choses qu’il n’est plus capable de faire, puis je culpabilise. » Pour tenir le coup, Eugénia s’est entourée d’un réseau d’aides et de soins : auxiliaire de vie, aide-ménagère, groupe d’aide aux aidants, infirmière, kiné… « Au début, je croyais pouvoir m’en sortir seule et je voulais protéger notre intimité. Mais leur soutien est indispensable pour lui comme pour moi. » >24 Isère Magazine-février-mars 2013
S. Anselmetti » Question à Françoise Anthonioz-Blanc, Médecin gériatre à l’hôpital de La Tour-du- Pin et responsable de l’antenne Nord-Isère de France Alzheimer. « Pour l’aidant, le danger c’est l’épuisement » » Témoignage On devient le parent e son propre parent » Bernard, 66 ans, habitant de Succieu en Nord-Isère, raconte le parcours de sa mère, Marcelle, 88 ans, atteinte de la maladie d’Alzheimer depuis 13 ans. Des solutions pour aider les aidants DR ■ Quelles sont les difficultés des aidants ? Une triple charge pèse sur leurs épaules : physique, financière, et surtout morale, car il faut cheminer avec un proche qui perd sa personnalité. Cela peut conduire à une profonde détresse et à l’isolement. Beaucoup d’aidants s’oublient pour se consacrer à l’autre et s’épuisent. ■ Comment se protéger ? Cela tient en trois mots : soutien, information, répit. Accepter de l’aide et ne pas rester seul, c’est essentiel pour tenir le coup et être efficace dans son rôle d’aidant. C’est pourquoi, France Alzheimer Isère propose des permanences d’écoute et d’information pour les malades et les familles, des entretiens individuels avec un psychologue pour les aidants confrontés à des situations particulièrement difficiles, et des groupes de paroles. Dans le cadre du plan Alzheimer, l’association dispense aussi une formation gratuite destinée aux aidants familiaux : 5 modules de 3 heures, avec une psychologue et un bénévole ancien aidant. L’objectif, c’est de mieux comprendre la maladie pour adapter son attitude à l’évolution du malade, mieux communiquer, avoir conscience de ses limites et anticiper les situations de crise. Enfin, l’aidant doit penser à lui. S’accorder des moments pour souffler, c’est se préserver pour accompagner le malade le plus longtemps possible. En Nord-Isère, nous avons créé la « halte mémoire et détente » sur deux sites. Unique en Isère, elle accueille les malades et les aidants ensemble, durant une demi-journée. Des activités permettent de stimuler les premiers, quand les seconds trouvent un moment de répit. C’est une bouffée d’oxygène et un plaisir partagé. La halte est animée par une psychologue et des bénévoles, avec des intervenants professionnels pour les activités : expression corporelle, peinture, musicothérapie… Contact : France Alzheimer Isère 04 76 43 18 19. L’association compte 200 adhérents et plusieurs antennes en Isère : Grenoble, Voiron, La Mure, La Tour-du-Pin (antenne Nord-Isère), canton de Vif (itinérante) et bientôt Vienne. F. Pattou ■ L’accueil de jour : le malade est accueilli de 9 h à 17h, dans un établissement, autour d’activités thérapeutiques de groupe - stimulation cognitive, maintien des gestes du quotidien, lien social, etc. Pendant ce temps, l’aidant peut se reposer, avoir un loisir, aller chez le médecin… ■ L’hébergement temporaire : le malade est accueilli dans un établissement pendant quelques jours ou semaines.Il participe aux mêmes activités que les résidents permanents : atelier mémoire, activités manuelles, chant… Cette solution permet à l’aidant de souffler. Elle peut aussi être utile s’il doit être hospitalisé. ■ Les groupes de parole et de soutien : les aidants échangent sur leur situation, leur vécu et leurs difficultés. Chacun s’enrichit de l’expérience des autres. Les aidants se sentent moins seuls et sont soutenus moralement. Le groupe est généralement animé par une psychologue ou un gériatre. » La maladie commence par des troubles de la mémoire. >25 Isère Magazine-février-mars 2013



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