20 Rencontre Côtes d’Armor M A G A Z I N E Rencontre avec des initiatives Christian Engel, vétérinaire à Broons La tournée d’un véto tous terrains Comme des centaines de ses confrères en Côtes d’Armor, premier département de France en productions animales, Christian Engel, jeune vétérinaire, a choisi « la rurale », comme on dit dans le métier. Il passe le plus clair de son temps auprès des bovins. Un choix dicté par la passion et le contact avec les éleveurs. Christian vérifie la cicatrisation d’une opération pratiquée pas ses soins quelques jours plus tôt sur un jeune veau, suite à une infection. Cet après-midi, d’autres opérations l’attendent. Thierry Jeandot I l est 9 h lorsque Christian, l’un des six vétérinaires du cabinet Duguesclin de Broons, arrive dans le premier élevage de sa tournée. « Le matin, je fais surtout des urgences, quelques soins et des suivis de troupeaux (obligatoires une fois par mois). L’aprèsmidi est plus consacr » e à des interventions chirurgicales ». La clientèle de Christian est presque exclusivement composée de producteurs laitiers. « Les » levages industriels porcins et avicoles sont int » - gr » s dans des filières coop » ratives qui disposent de leurs propres v » tos salari » s ». Il ouvre le haillon de son break, découvrant une grande armoire à pharmacie. Il est venu vérifier l’état du pied d’une vache qu’il a dû amputer d’un onglon, à la suite d’un kyste infectieux. L’éleveur a déjà préparé l’animal, enserré dans une cage. Christian plie la patte blessée, pose le pied de la vache sur son genou et défait le pansement. Diagnostic : « C’est propre, on va changer le pansement, la cicatrisation se passe bien, elle doit être soulag »e. Mais tu la laisses sur paille encore quelques jours », lance-t-il à l’éleveur. « Il y a beaucoup de problèmes de pieds, dus principalement au fait que les bêtes passent du temps en stabulation sur un sol dur. C’est pourquoi je dois souvent La diversité du métier tailler les onglons pour assurer un meilleur aplombà l’animal ». Seconde étape de la tournée, au Gaec familial du Bas-Epinay, près de Caulnes, pour le suivi mensuel d’un troupeau de 100 Prim’Holstein. Accueilli par Evelyne et Gildas, deux des sociétaires, il va devoir inspec - ter toutes les va ches, sagement alignées dans leur stabulation. « La Prim’Holstein est comme une Formule I, indique Christian. Elle donne le meilleur rendement laitier mais, issue de nombreuses s » lections g » n » tiques, elle est très fragile. Les pathologies les plus courantes sont les mammites (inflammation des mamelles très contagieuse), les m » trites (infection de la paroi utérine) et les d » placements de caillettes (estomac) qui se retournent et n » cessitent une intervention chirurgicale ; j’en opère plus de 150 par an ». Le confident de l’éleveur L’échographe en bandoulière, il enfile un gant qui remonte jusqu’à l’épaule et « fouille » avec sa sonde les organes génitaux de la première vache. Bonne nouvelle : inséminée il y a 81 jours, elle est pleine et il peut déterminer sur son Thierry Jeandot Inspection mensuelle du troupeau au Gaec du Bas-Epinay. Christian montre à Albane, salariée du Gaec l’écran de l’échographe qui révèle que la vache est pleine. écran le sexe du fœtus. « C’est une femelle », annonce-t-il à Evelyne, qui suit les opérations en annotant sur un tableau le diagnostic, b’te par b’te. Puis elle entrera toutes ces informations dans une base de données à laquelle Christian a accès via internet. Poursuite de l’inspection. Telle vache a une métrite, telle autre a été inséminée sans succès - on lui prescrira un traitement hormonal – une autre, âgée de huit ans, va devoir partir à la réforme (abattoir), après six v’lages. En moyenne, un troupeau de laitières est renouvelé d’un tiers chaque année. Christian inspecte également les pis et examine les bouses, pour vérifier si les b’tes digèrent bien. « L’alimentation tient un rôle essentiel dans le rendement. On parle beaucoup alimentation avec les » leveurs, surtout en ce moment ; ils sont en pleine p » riode d’approvisionnement pour l’hiver... » Oui, on parle beaucoup... le vétérinaire rural devient un peu le confident de l’éleveur confronté à des crises récurrentes (prix du lait, épizooties diverses, difficultés économiques...), un peu comme un patient se confierait à son médecin. La vocation de Christian ? « Elle est venue très jeune. Au sortir de mes » tudes v » t » - rinaires à Nantes, un v » t » rinaire du cabinet de Broons est parti en retraite, j’ai pris sa relève en 1999. Ce que j’aime, c’est pratiquer la ‘rurale traditionnelle’, dans toute sa diversit ». On est à la fois soignant, chirurgien et conseiller. Il faut aussi g » rer les urgences, notamment les vêlages difficiles. Et puis il y a cette relation humaine qui s’ » tablit avec les » leveurs. Tout cela m’apporte beaucoup, je m’ » panouis dans ce m » tier ». Bernard Bossard |