18 le maga zine du Cher portraits Le magazine du cher Annie Leblois L’enfance, c’est la pupille de ses yeux « Un jour, on donne un coup de main, et puis tout le bras y passe ! » Bien des bénévoles engagés dans le monde associatif se reconnaîtront dans ce que décrit Annie Leblois. Les bonnes volontés sont rarement sous-employées. Membre du Centre départemental de l’enfance et de la famille (CDEF) depuis 1981, Annie Leblois siège aujourd’hui à la commission de surveillance de l’établissement. Adhérente puis dirigeante de l’Aide sociale à l’enfance de 1978 à 1996, longtemps responsable de parents d’élèves et d’un club de gym, elle préside toujours l’Association de l’encouragement et du dévouement et la section départementale d’une association de défense des consommateurs. Auraitelle la folie des grandeurs ? Certainement pas. Besoin de reconnaissance ? Peut-être. Envie de tendre la main aux plus fragiles ? Sûrement. Pendant quarante et un ans, Annie Leblois a cru qu’elle était Relevant des Conseils généraux, le Centre départemental de l’enfance et de la famille (CDEF) est un établissement public qui assure, dans le cadre de la protection de l’enfance, l’accueil d’urgence des mineurs confiés au Conseil général par le Juge des enfants ou par leurs parents, ainsi que l’hébergement de mères isolées avec un jeune enfant et nécessitant une protection. « Un jour, on donne un coup de main, et puis tout le bras y passe ! » née à Vierzon, puis avait été abandonnée par une jeune « fille-mère » soucieuse d’échapper à l’opprobre public. Placée par l’Assistance publique chez une veuve à Saint-Martind’Auxigny, elle y reste jusqu’à ce qu’elle trouve un travail de secrétaire comptable, à Bourges. En 1989, alors qu’elle est engagée depuis plus de dix ans auprès de l’Aide sociale à l’enfance, elle trouve le courage de faire pour elle-même ce qu’elle conseille aux autres « pupilles » : elle consulte son dossier personnel. Elle découvre qu’elle est bien née en 1944, mais à Bourges. Qu’elle était la seconde fille de l’épouse d’un prisonnier français. Mais que son père était un soldat allemand. Puis que sa mère a refusé de la reprendre, au début des années 1950. Enfin, que son existence a été cachée à ses demi-frères et sœurs. « Le ciel m’est tombé sur la tête en même temps que le sol s’écroulait sous mes pieds ! » Pour grandir comme les autres, les enfants abandonnés se construisent une histoire, font repousser la nuit les racines coupées à l’aube de leur vie. Des rêves d’autant plus forts qu’ils sont contrariés. « À l’âge de 20 ans, j’ai voulu savoir. La loi ne le permettait pas. On me disait : « Pose donc pas de questions ! » Mais c’est dur d’être « de l’Assistance », la « mauvaise graine » accusée au moindre mauvais coup. » Pour Annie Leblois, la prise en charge des enfants retirés à leurs familles a énormément progressé. « Aujourd’hui, même s’ils ont vécu des choses douloureuses, on ne prive plus les gamins de leur histoire ». François Toulat-Brisson |