À Empuré, Français et Britanniques conversent ensemble. Cela grâce à Judith MacArthur, présidente et fondatrice de l’association Le Coq et la Rose. Souvent, par le passé, le coq se piqua à la rose. Mais il arriva aussi que la so british fleur prît amoureusement racine dans la terre du fier emblème gaulois. C’est ce que fit Judith MacArthur, poussée par la retraite et le vent d’outre-Manche jusque dans le bourg nord-charentais d’Empuré, à quelques lieues de Villefagnan, voici une douzaine d’années, rejointe plus tard par son frère jumeau Andrew, avec pour tout bagage quelques grains de pollen de français appris au collège, pas mal de courage, et la ferme résolution d’en découdre avec les subtilités de la langue de Molière. La rose s’est joliment épanouie : aujourd’hui la sexagénaire, originaire d’Epsom, est bilingue, possède la double nationalité, est élue conseillère municipale de son village. Et, last but not least, se trouve à la tête d’une association locale de rencontres francobritanniques, justement nommée Le Coq et la Rose et comprenant une soixantaine de pétalesmembres. Au sein de cette corolle, composée d’un tiers de Français, deux tiers de Britanniques, tout est prétexte à échanges linguistiques au rythme d’une fois par mois : repas champêtres, randonnées, visites de jardins avec échanges de plants (Judith MacArthur adore le jardinage), chasses au trésor, voyages organisés, soirées quiz, concours de belote, concerts… « Paradoxalement, le fait d’être seule », explique Judith MacArthur, flanquée de son chat Eliot, pelisse de velours gris et jarrets de neige, « m’a beaucoup aidée : j’ai bien été obligée de me débrouiller avec mes voisins – qui se sont montrés merveilleusement accueillants. Mais la plupart des Anglais restent entre eux et continuent de balbutier quelques mots de français des années après leur arrivée. J’ai créé Le Coq et la Rose dès 2004 pour les accompagner dans leur intégration. » Le triomphe de Judith ? « Quand deux Anglais, lors d’une soirée, s’adressent la parole en français ! » Elle-même se met souvent à penser ou à rêver dans la langue de son pays d’adoption… mais ne sait plus très bien de quel côté son cœur bat quand Andy Murray et Jo-Wilfried Tsonga s’affrontent en demi-finale de Roland-Garros à la télévision. Sa famille n’est pas en reste de cosmopolitisme : l’un de ses fils, marié à une Russo- Jordanienne, vit en Suède, l’autre au Japon ; seul le troisième est resté en Angleterre. Judith MacArthur, qui a étudié la littérature et le théâtre à l’université du pays de Galles, ne se contente pas de présider Le Coq et la Rose. Elle donne aussi des cours de français aux Anglais et réciproquement. Comme elle le dit en riant : « Ma retraite est très active ! » À ces mots, le chat Eliot (baptisé ainsi en hommage au poète américain qui vécut tant en France qu’au Royaume-Uni) a dressé l’oreille. Langoureusement allongé aux pieds de sa maîtresse en ce clair après-midi, il n’a pas perdu une moustache de la conversation. Peut-être est-il bilingue lui aussi. Who knows ? ce qu'ELLE AIME EN CHARENTE• Les champs de tournesols dans la lumière du matin.• Les gens de la campagne.• Le sens de la communauté, presque disparu en Angleterre, même dans les villages. ce qu'ELLE n'AIME PAS• Il n’y a pas de Marks & Spencer ! TONUS CHARENTE 45