“Le livre est une source de plaisir” Photo : J. P. Herbecq Damien Bouticourt dirige Maupetit-Actes Sud, la plus ancienne librairie de Marseille. Lauréat de l’appel d’offres pour la future librairie du Mucem, il vient d’ouvrir en association avec deux confrères marseillais, L’Odeur du Temps et Histoire de l’œil, deux librairies sur des sites phares de MP2013 : la Friche Belle de Mai et le J1. 4 Accents : Ouverture de deux librairies pour MP2013, future librairie du Mucem : alors que le livre et les libraires sont annoncés à l’agonie, vous faites feu de tous bois. Paradoxal ? Damien Bouticourt : En réalité, il pourrait y avoir plus de librairies à Marseille. Si elles sont rares ici - une vingtaine de librairies indépendantes - ce n’est pas parce que les gens lisent moins. Je prétends le contraire : les gens lisent moins parce que l’offre est trop réduite. D’ailleurs, lorsqu’une librairie ferme, ses confrères ne récupèrent qu’une part d’une clientèle qui semble s’évanouir d’un seul coup. Quand l’offre est présente, les gens font preuve de curiosité, s’intéressent : lors du week-end d’ouverture de MP 2013, nos deux nouvelles librairies ont connu un engouement aussi immédiat que spectaculaire. A. : Comment expliquer ce manque de librairies ? D. B. : Une librairie ne permet que des marges très faibles : 0,2 ou 0,3 % du CA en moyenne, quand ça marche ! Et qui dit rentabilité réduite dit comptes fragiles. Le moindre pépin peut avoir des conséquences dramatiques. Du coup, ACCENTS n°215 :: Interview il est très difficile de revendre une librairie et les départs en retraite se soldent souvent par un abandon de l’activité au profit de commerces différents supposés économiquement plus rentables. Créer une librairie est également très difficile. Il faut imposer une image que le lecteur saura identifier : cela nécessite du temps, un stock pertinent, des livres que l’on vend parfois peu mais qui sont votre marque de fabrique. Et ce stock-là, immobilisé, coûte cher, surtout quand on se lance. Un stock important, qualitatif, c’est notamment l’une des clés de la réussite de la désormais fameuse librairie des Bleuets à Banon dans les Alpes de Haute-Provence. A. : Vous dirigez la plus ancienne librairie de Marseille : 85 ans ! Quels sont les atouts dont vous disposez face à la concurrence de la vente en ligne ? D. B. : Chaque librairie est un lieu unique, porteur d’une histoire, reflet d’une vision et d’une offre spécifiques. Il faut maintenir vivante cette dimension, afin que les gens ne viennent pas seulement lorsqu’ils ont un besoin (pour leurs études, pour leur travail...), mais aussi et surtout pour le plaisir. Nous participons chaque jour à créer un environnement culturel dans la ville en |