[13] Accents n°209 fév/mar 2012
[13] Accents n°209 fév/mar 2012
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°209 de fév/mar 2012

  • Périodicité : bimestriel

  • Editeur : Conseil Général des Bouches-du-Rhône

  • Format : (210 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 5,7 Mo

  • Dans ce numéro : santé, l'état d'urgence.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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4 DR Anne Laude vient de publier « Refus des soins et actualités sur les droits des malades », avec StephaneBrissy et Didier Tabuteau, Presses de l’EHESP, 2012 ACCENTS n°209 Interview Sécurité sanitaire « Les patients doivent être reconnus comme un contre-pouvoir » Co-directeur de l’Institut droit et santé, Professeur à l’université Paris-Décartes, Anne Laude a été auditionnée, en qualité d’expert, par la commission d’information du sénat sur le médiator. Accents : Bisphenol A, Mediator, prothèses Pip… En matière de sécurité sanitaire, les crises semblent succéder aux crises en s’accélérant. Cette perception est-elle juste ? Anne Laude : En effet, les crises semblent se succéder. Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, la société sort peu à peu d’une longue phase où la question de la santé restait trop souvent circonscrite au face à face médecin-patient. Les problématiques sanitaires émergent à présent à l’échelle de la société, mettant en exergue toute une chaîne de responsabilités. Nous parlons désormais de santé publique et c’est une dimension assez nouvelle. Pendant trop longtemps, on a fait une confiance aveugle aux médicaments, le ministère de la Santé avait peu de moyens. Par ailleurs, la société s’est imposée un nouvel impératif : le risque zéro, ce qui accroît considérablement notre sensibilité sur tous les enjeux de santé. Enfin, de crise en crise, notre système s’est révélé peu capable de détecter les alertes. On a le sentiment que le dispositif de contrôle et de suivi de la puissance publique ne progresse que parce qu’il subit ces crises. Est-ce à dire que des réformes ne peuvent être obtenues dans la sérénité ? A.L. : Il est vrai que la loi du 29 décembre dernier, que l’on pourrait baptiser rapidement « Loi Mediator », a été votée dans l’urgence, en 6 mois, ce qui est exceptionnel. Toutefois, il faut avoir à l’esprit qu’une directive européenne du 15 décembre 2010 donne jusqu’au mois de juillet 2012 aux 27 Etats membres pour transposer dans leur législation une série de dispositions relatives à la pharmacovigilance. La France a en quelque sorte devancé l’appel. Et nulle trace du Mediator dans la démarche de la Commission européenne. Le principe de précaution a été introduit dans la Constitution. C’est un progrès ? Un frein ? Les deux ? A.L. : Ce principe a été introduit en 2005 dans la Constitution, mais ce n’était pas nécessaire,
dans la mesure où l’Europe nous impose son application. En France, nous avons fait un choix symbolique. Le principe de précaution peut être envisagé de deux façons. Première solution : dès lors qu’il y a un doute, je suspends toute action. Seconde solution : j’examine toutes les hypothèses pour ensuite choisir la voie la plus équilibrée, la plus précautionneuse. Le principe de précaution peut donc avoir des conséquences positives ou négatives. Il peut conduire à donner le plus Photos : J. P.Herbecq grand poids au plus petit risque, à exagérer la menace et plonger la société dans une crise permanente. Ceci a des conséquences politiques dans un pays où des ministres ont été jugés et lourdement condamnés dans une affaire sanitaire, je veux parler du sang contaminé. Le principe de précaution est donc tantôt brandi comme un épouvantail, tantôt utilisé pour protéger les décideurs. Pour que nos concitoyens retrouvent confiance, des réformes profondes du système de sécurité sanitaire semblent nécessaires. Qu’apporte la loi du 29 décembre 2011 ? A.L. : Cette loi, dont on attend encore les décrets d’application, n’est pas complète. La preuve, c’est que la question du contrôle des dispositifs médicaux (Prothèses mammaires mais aussi pacemaker, stérilet, scanner ou simples sparadraps...) n’est pas traitée. Cependant, elle apporte de nombreuses améliorations. Sur l’indépendance des experts par exemple, des sanctions pénales sont envisagées si un expert omet de déclarer sciemment sa situation et intervient dans un dossier où il est juge et partie. Et ce, même si aucun problème sanitaire n’est constaté. Sur la question de la transparence, la loi a apporté beaucoup d’éléments de réponse, avec la publicité des ordres du jour, des débats, des avis minoritaires et une véritable reconnaissance pour les lanceurs d’alerte que l’on ne pourra plus écarter d’un revers de main. On peut toutefois regretter que les conflits d’intérêt apparaissent circonscrits au seul domaine de la santé, alors que c’est un problème malheureusement beaucoup plus général. Quelle place et quel statut pour les experts ? Et quelle place pour les patients et usagers ? Comment, sur ces questions de statut, faire évoluer le droit ? A.L. : Malheureusement, dans les textes, rien ne permet pour l’instant de fonder un véritable statut de l’expert. La question du statut des usagers n’est pas non plus réglée. Il existe des dispositions depuis 2002 et la loi sur les droits des malades ; la nouvelle loi les renforce, mais c’est insuffisant. Les patients, les usagers doivent être reconnus comme un véritable contre-pouvoir. Leurs représentants devraient bénéficier d’un statut comparable à celui d’un délégué syndical. Ce qui nécessite des moyens financiers, pour les former, les rémunérer et c’est sans doute là que le bât blesse. Pourtant, c’est par ce chemin-là que progressera vraiment la démocratie sanitaire, en associant les usagers - qui sont quand même les principaux intéressés - à tous les niveaux, y compris au plan local. N’oublions pas que les patients sont les premiers à constater les disfonctionnements et à pouvoir donner l’alerte. Propos recueillis par Jean-Michel Amitrano ACCENTS n°209 Interview 5



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