[13] Accents n°208 déc 11/jan 2012
[13] Accents n°208 déc 11/jan 2012
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°208 de déc 11/jan 2012

  • Périodicité : bimestriel

  • Editeur : Conseil Général des Bouches-du-Rhône

  • Format : (210 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 5,7 Mo

  • Dans ce numéro : fac, les années difficiles.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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4 DR ACCENTS n°208 Interview Frog 974 - Fotolia.com « Le pire serait de tomber dans un système à l’américaine » Dette, crise de l’euro et de l’Europe, États au bord de la faillite. Après trois ans de tempête financière et sociale, bien des certitudes vacillent. Bernard Maris, économiste engagé – il est Oncle Bernard pour les lecteurs de Charlie Hebdo – répond avec talent et humour aux questions d’Accents. Accents : On nous affirme, chiffres à l’appui, que le temps de l’État providence est révolu. Faut-il signer son acte de décès ou bien chercher à le réinventer ? Bernard Maris : L’État providence est une invention démocratique essentielle. C’est une société d’assurance. La protection des citoyens du risque (maladie, chômage, accidents) et l’accès aux biens publics fondamentaux (l’éducation, la culture) sont essentiels pour maintenir la liberté de penser et d’agir. Une population qui vit sous le risque est soumise. Il n’y a pas pire dictateur que le risque. En revanche, il faut sans doute le réinventer. En tout cas, promouvoir un financement pérenne. Et pour ça, il faut précisément sortir de l’économie de rente, de parasitisme, que constitue l’économie des marchés financiers. Il faut comprendre que tout le secteur financier et bancaire ne crée pas de valeur. Mieux : qu’il détruit de la valeur plus qu’il n’en crée. Il faut sans doute fiscaliser également une partie de la protection sociale. Il faut faire payer la protection sociale aux pays qui n’en ont pas et nous concurrencent. Le pire serait de tomber dans un système à l’américaine, où les gens ne sont pas soignés et payent en moyenne deux fois plus que les Français. Si l’État a des caisses vides, peut-on trouver de l’argent ailleurs ? Auprès des collectivités locales ou bien en s’attaquant aux dépenses sociales ? B. M. : Le gros morceau, en volume, ne le cachons pas, c’est la protection sociale. Pourquoi ne pas obliger l’État à équilibrer son budget, comme le prévoit la réglementation pour les collectivités locales ? B. M. : Oui, sauf que certaines dépenses publiques ne sont pas des dépenses mais des investissements. C’est toute la différence entre l’éducation, la recherche, et les dépenses de retraite. Ces dépenses publiques devraient être sorties, en partie, du budget de l’État.
L’augmentation de la fiscalité est-elle la seule porte de sortie ? B. M. : Évidemment non, la seule sortie c’est la croissance. En 1944, la France est endettée de 200%, elle rembourse en 4 ans ! Mais quelle croissance ? That is the question, à une époque où l’environnement devient un problème essentiel. En tout cas, pour la fiscalité, seule une profonde réforme, rééquilibrant les contributions de chacun, permet d’accepter son augmentation. Qu’est-ce qu’une fiscalité juste, au plan national et au plan local ? B. M. : C’est une fiscalité acceptée. L’impôt est l’un des piliers de la démocratie. Réhabiliter l’impôt est essentiel. La fraude fiscale est une honte. Mais pour réhabiliter l’impôt, il faut que la dépense publique soit perçue comme utile et juste. La santé n’est pas mise en question en France, parce que le système de santé est l’un des meilleurs du monde. Il faut qu’il le reste. Comment redonner sens à l’idée républicaine de redistribution, dans une société et un pays que la mondialisation bouscule ? B. M. : Joker ! Face aux difficultés financières, quelle alternative pour les collectivités ? Regroupement ? Redéfinition des compétences ? Autonomie fiscale ? B. M. : Les trois, mon général ! Malgré la pression de la crise, les Français souhaitent que les services publics (éducation, santé, sécurité...) soient maintenus sans augmentation de la pression fiscale. Est-ce une illusion ? Comment résoudre cette contradiction ? B. M. : Par une nouvelle croissance, je le redis. Or la croissance, c’est du travail et de la productivité. Quelles sont les sources de productivité ? Les gisements de travail ? Ils sont énormes : un pays qui a 10% de chômeurs a d’énormes gisements de travail. Ne sommes-nous pas confrontés à la crise – effondrement - d’un monde qui « réduit » le citoyen à un consommateur, et cela à l’échelle planétaire ? B. M. : Oui, très bonne question, c’est évident. Le modèle dont nous sortons est celui de l’accumulation des biens (voiture, plus frigo, plus, plus, plus…) qui fait le bonheur. Il faut trouver une « nouvelle abondance ». Il y a des pistes. L’économie solidaire, les logiciels libres… Dans ce contexte, le modèle français est-il « du passé », c’est-à-dire, dépassé ? B. M. : Il faut surtout prendre conscience que nous sommes en avance, je dis bien en avance ; nous sommes à la fin d’un modèle, c’est vrai, mais la folie serait de revenir en arrière, au capitalisme du 19 e (ce qui nous menace depuis que l’économie financière a pris le pouvoir). Quelle reconstruction ? Quelle construction ? À suivre… La crise s’installe. Souvent difficile à comprendre, même si nous nous savons tous concernés. Accents continuera à la décrypter dans ses prochains numéros. SVLuma - Fotolia.com ACCENTS n°208 Interview 5



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