[13] Accents n°196 janvier 2010
[13] Accents n°196 janvier 2010
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°196 de janvier 2010

  • Périodicité : bimestriel

  • Editeur : Conseil Général des Bouches-du-Rhône

  • Format : (210 x 297) mm

  • Nombre de pages : 36

  • Taille du fichier PDF : 9,2 Mo

  • Dans ce numéro : agriculture... le « made in Provence » en crise.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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. Dossier JEAN-FRANÇOIS MARGIER, OLÉICULTEUR À AURIOL « DU BON, DU BEAU, DU BIO » En 2004, l’exploitation de Jean- François Margier fut la première des Bouches-du-Rhône qualifiée en agriculture raisonnée. L’oléiculteur joue à fond la carte de la qualité et ça plaît. Ses clients viennent d’Aix ou Marseille pour venir chercher l’huile d’olive du moulin Margier. Depuis 2008, ses productions, d’huile d’olive, de vin et de raisin, sont en reconversion bio. « Quand on est sur des productions qualitatives, avec des AOC, le bio, c’est une condition nécessaire pour vendre au prix rémunérateur. Aujourd’hui, les consommateurs veulent du bon, du beau, du bio. La qualité est devenue incontournable. Elle a un coût, mais il y a un retour sur investissement ». 6• ACCENTS JEAN-NOËL FABRE, SÉNAS ZANDRÉ BOULARD, PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE D’AGRICULTURE Rétablir les règles du jeu Dans quelle situation se trouve l’agriculture dans les Bouches-du-Rhône ? André Boulard : Elle est dans le rouge. Les exploitations agricoles ont vécu une année 2009 très difficile. Les pertes nettes s’élèvent à 100 millions d’euros. Et dans l’ensemble, toutes les filières sont touchées. Quels sont les facteurs qui expliquent ce sombre tableau ? A. B. : outre la conjoncture économique, l’agriculture subit une crise structurelle depuis longtemps. D’une part, parce qu’elle rencontre un problème de compétitivité. En France, le coût de la main d’œuvre est trop élevé par rapport à ceux pratiqués dans de nombreux pays. Et nous subissons de nombreuses distorsions de concurrence accentuées par les accords commerciaux passés par l’Europe avec des pays tels que le Maroc, la Turquie, voire plus loin avec la Chine, qui produisent à moindre coût, parfois à moins de 2 € de l’heure pour la main d’œuvre. Cela fausse les règles du jeu. D’autre part, la filière des fruits et légumes, prédominante dans le département, est très peu aidée par les aides européennes de la Politique agricole commune (PAC). De plus, le poids de la grande distribution, très concentrée en France, nous pénalise. Les marges de négociation des agriculteurs avec la grande distribution sont faibles. Les agriculteurs sont contraints de vendre leur production à des prix toujours plus bas. Mais cela ne se retrouve pas sur les étiquettes des prix pour le consommateur ? A. B. : Parce qu’il y a un triangle « infernal » : production, négociation, distribution. C’est pourquoi, nous réclamons un observatoire des prix pour voir la réalité des négociations entre les différents intermédiaires. Il faut plus de transparence. Encore une fois, tous les plans d’urgence pour sauver l’agriculture ne changeront rien si on ne met pas en place les mécanismes normaux d’un marché équilibré. Pourtant le consommateur semble revenir à une consommation plus citoyenne, vers des produits locaux. N’y a-t-il pas là des débouchés pour l’agriculture locale ? A. B. : oui, c’est une des raisons d’être optimistes. Il faut sensibiliser encore les citoyens sur l’intérêt de maintenir une agriculture locale forte : intérêt économique pour l’emploi, intérêt sanitaire pour la qualité, enfin intérêt écologique. n Propos recueillis par P.H. Un arboriculteur (presque) heureux La photo de son profil Facebook, c’est une belle poire verte, appétissante ! À Sénas, il a repris l’exploitation familiale et on est chez les Fabre, arboriculteur de père en fils. Et ça le restera, a décidé Jean-Noël, 3 e des Fabre à faire dans la pomme et dans la poire. Jean-Noël Fabre a très tôt compris la règle de la réussite. « Si on cesse d’investir, on meurt à petit feu. » Et pourtant, investir nécessite une bonne trésorerie, souvent difficile en temps de crise. Et il assène sévèrement : « Si la grande distribution ne réduit pas ses marges, ça ne repartira pas. » Il produit chaque année 1000 tonnes de poires et de pommes sur ses 45 hectares et les commercialise par le biais de l’Organisation de Producteurs « Les Vergers de Beauregard », à laquelle est affiliée une quarantaine d’exploitations familiales. Lui croit qu’il faut parvenir à combiner le volume, la plus-value, l’investissement et la qualité. Alors, il dresse un premier constat : « De la pomme, on en fait presque partout dans le monde, à l’exception de l’Equateur ! Des poires, non. La culture du poirier comporte certes des contraintes. Mais ici, cette culture peut être exceptionnelle. » Il entend donc produire davantage de poires que de pommes dans les années à venir. Deuxième constat : il faut investir pour résister. C’est ce qu’il fait, en achetant deux grands frigos qui servent à conditionner ses fruits. Coût de l’achat pour le seul frigo extérieur : 120 000 € ! « Aujourd’hui, celui qui ne stocke pas, perd. » Il admet se rémunérer « correctement », à hauteur de 2000 € par mois. Et assène une simple vérité : « les efforts consentis par les paysans servent à nourrir la société. » Ch. F.-K.
ZADEAR « On peut répondre à la demande » NÉS AU JAPON Les systèmes de circuits courts sont nés au Japon, 20 ans après Hiroshima. Dans les années 60, des mères de familles japonaises s’inquiètent de voir l’agriculture s’industrialiser avec un recours massif aux produits chimiques (en 1957, les premières victimes de Minamata, empoisonnées au mercure, sont déclarées). Ces mères fondent alors en 1965 les premiers Teikei (« partenariat ») … Depuis, 16 millions de Japonais y ont adhéré. 3000 FAMILLES À MARSEILLE Dans toutes les villes du département ou presque, les Amap (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) fédèrent un nombre croissant de familles solidaires des paysans des Bouches-du-Rhône. Sur la seule ville de Marseille, 3000 familles ont choisi cette voie et les listes d’attente s’allongent. Rien de neuf sous le soleil pour les membres de l’Adear (Association pour le développement de l’emploi agricole et rural) : « Pour nous, la crise n’est pas passagère. ça fait même 20 ans qu’on dit que cette crise est structurelle, commente Mattia Siffredi, co-président. On nous a pris pendant tant de temps pour des rigolos. » Il ajoute : « Il y a trois décennies, on a décidé de nourrir les Anglais et les Allemands au détriment de nos populations… En se disant qu’avec la mondialisation, on paiera moins cher. » Les paysans l’assurent, eux qui passent la journée à produire sain et à vendre, pour certains par exemple, des salades coupée du matin même : « Dans les Bouches-du-Rhône, on peut répondre à la demande. Et pourtant 70% de la production locale est exportée, et nous importons 80% de ce que nous consommons ! » une aberration écologique et économique. A l’Adear, proche de la Confédération paysanne, les solutions sont réfléchies : « Les revendeurs des fruits et légumes sur les marchés sont les meilleurs représentants de la profession. Ils ne doivent pas banaliser leur métier, ni faire toujours le choix du moins cher. » Car selon Armand Durigon, co-président et maraîcher luimême, « une marchandise valorisée et tracée, c’est 25% de ventes en plus. » Autre marge de manoeuvre, plus massive : « On va proposer de travailler sur la restauration collective », prévient Frédéric Vuillermet, de la Confédération paysanne. un Français sur 6 déjeune en collectif (entreprises, cafétérias, hôpitaux, établissements scolaires, etc.). Il y a effectivement de quoi amorcer un sacré virage « vers le moins polluant et le plus goûteux. » n Ch. F.-K. LES PANIERS DE VAUBAN La stratégie du colibri C’est à la fois une prise de conscience personnelle doublée d’un besoin de manger bon et frais qui a poussé ces voisins-là, comme tant d’autres dans le département, à s’unir pour créer « Les paniers de Vauban », affiliés aux « Paniers marseillais ». Une conférence sur l’alimentation bio déclenche il y a deux ans une prise de conscience : « Parler de l’intérêt de manger sain, c’est bien, mais le faire, c’est mieux ! », justifie Catherine Gaillard, membre de l’animation des « Paniers de Vauban ». Ils contactent alors une Amap (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne) et trouvent un producteur disponible. « Nous lui achetons à l’avance sa production, sur 6 mois, en fonction des produits de saison » précise Catherine. Des habitudes alimentaires modifiées Manger sain et frais donc, mais aussi privilégier les circuits courts, sans intermédiaire. « Toutes les dimensions du développement durable sont là : l’aspect économique, puisqu’un gros panier avec environ 7 kgs de légumes coûte 20 €, l’aspect du circuit court qui fait vivre des producteurs locaux. Cela modifie également nos habitudes de consommation et nous détourne des excès passés. Enfin, il y a un aspect solidaire de soutien à une profession en grand danger. » Alors bien sûr, les Amapiens, ces « consom’acteurs », le reconnaissent, les paniers ne sont parfois pas assez diversifiés. Reste que « la défense des alentours de nos villes, en terme d’urbanisation », est l’un des arguments forts à cette adhésion. « C’est une démarche citoyenne. » précise Catherine. C’est ce que l’on appelle la stratégie du colibri, ce minuscule oiseau qui devant l’incendie de la forêt, va chercher dans son bec de l’eau pour l’éteindre. Les autres animaux ne font rien et lui disent que cela ne sert à rien. Lui répond : « Je sais, mais je fais ma part ». Ch. F.-K. ACCENTS• 7 ACCENTS• 7



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