patrimoine protestantisme Il y a 300 ans, naissait Marie Durand Il est des destins exceptionnels mais cruels. Tel fut celui de Marie Durand dans un x v i i i e siècle où il ne faisait pas bon être protestant. Persécutions, exécutions, emprisonnements furent le lot quotidien de ceux qui étaient attachés profondément à leur foi. Le Vivarais fut une région particulièrement touchée par la répression, avec les tristement célèbres dragonnades. Marie Durand est née le 15 juillet 1711 dans le hameau du Bouschet de Pranles en plein cœur du Vivarais. Issue d’une famille de notables protestants du Vivarais, son père Etienne était greffier consulaire. La famille pratique la religion "prétendument réformée", à une époque où la révocation de l’Edit de Nantes en 1685 l'interdit. La "justice" va s’abattre sur toute la famille pour faire un exemple. Alors que Marie n’a que sept ans et demi, sa mère est arrêtée pour avoir participé à une assemblée illicite à la Combe de Navalet. Elle mourra en prison. Des dragons séjournent à cette époque dans la maison, souvenir brutal et odieux. Son père Etienne, arrêté en 1728 est envoyé au fort de Brescou, près d’Agde tout comme son époux, de 25 ans son aîné, Matthieu Serres ! Le frère et parrain de Marie, Pierre, 16 - - n°49 - automne 2011 Le Bouschet de Pranles, Musée du Vivarais protestant pasteur du Désert, est arrêté et exécuté le 22 avril 1732 à Montpellier. Emprisonnée durant 38 ans Quant à Marie, elle est arrêtée en 1730 et emprisonnée à la tour de Constance à Aigues-Mortes. Elle avait 19 ans. Elle y restera jusqu’en 1768 ! Comment imaginer un emprisonnement de 38 ans dans une tour froide, humide où la promiscuité règne (elles sont une trentaine de femmes) ? Le mot « résister » gravé sur la margelle du puits de la prison est sans doute une réponse à cette longue captivité, une réponse faite de courage, de ténacité et de foi. Pendant toute la durée de son emprisonnement, jamais Marie Durand ne renie sa foi alors que la conversion à la religion catholique lui aurait ouvert –comme à ses codétenues– les portes de la prison. Marie Durand écrit de nombreuses lettres : lettres de suppliques pour demander du secours ou de remerciements aux rares donateurs. Elle écrit également des lettres au pasteur nîmois Paul Rabaut chargé de s’occuper des prisonnières ou à sa nièce Anne. Dans tous ces écrits, sa foi reste inébranlable : elle écrit ainsi le 21 avril 1752 que « Dieu nous fera la grâce de changer le temps et nous pourrons nous voir Musée du Vivarais protestant ensemble, moyennant son secours ». Il est vrai que parfois des rumeurs de libération circulent. Pourtant, le 21 août 1762, elle écrit à Paul Rabaut : « Il y a trente-trois ans que je gémis dans cette affreuse prison… je n’avais pas été dans un aussi triste état que je suis… ma santé aussi altérée qu’elle l’est depuis un an ». Il lui faudra encore patienter six ans… C’est parce que le gouverneur du Languedoc, le prince de Beauvau, visitant en 1767 la tour Constance s’émeut du sort de ces femmes emprisonnées que ces dernières sont peu à peu libérées l’année suivante. Rentrée au Bouschet à Pranles, Marie Durand s'y éteint en 1776. De cette femme d’exception, héroïne du protestantisme, il reste outre les lettres, un lieu de mémoire, le Bouschet de Pranles, également musée du Vivarais protestant. Cette ancienne maison forte du xv e siècle, pétrie d’histoire et de tragédie est classée Monument historique depuis 1969. Plus d’infos sur le Musée du Vivarais protestant http://lebouschetdepranles.free.fr/04 75 64 22 74 aux heures d’ouverture 04 75 64 30 39 en dehors des heures d’ouverture Musée du Vivarais protestant |