La m on t a g ne ardéchoise est en de u i l le m on de d e s poètes et de la c h a n s on aussi. A quelques jours du printemps, la disparition de Jean Tenenbaum, plus connu sous le nom de Jean Ferrat, ternit l'arrivée des beaux jours, endeuille le cœur des Ardéchois pour longtemps… « Ici, il n'y a pas un repas de famille sans qu'on ne chante "Jean", sans qu'on ne reprenne "La Montagne" » confie une Ardéchoise de toujours. Depuis quarante ans, il avait fait corps avec ce pays, son village d'Antraigues. Sa silhouette bienveillante faisait partie de la place où il a si souvent joué aux boules. Au-delà des clichés bucoliques, c'est aussi un homme aux convictions politiques affirmées qui disparaît. La "Gauche" au sens large perd le plus poétique de ses messagers, celui qui jamais ne sacrifia ses convictions aux feux de la scène ni aux vertiges du succès. Les humanistes voient partir celui qui toute sa vie a lutté contre toutes les formes de servitude, seulement avec des mots, mais des mots si justement dits… La montagne ardéchoise vibrera longtemps du fabuleux hommage rendu à Jean Ferrat le 16 mars dernier sur sa terre d'adoption, cette terre où vivent sa compagne, sa fille et ses amis ; cette terre qu'il a si bien chantée. Caroline Paux (Archives départementales) Philippe Fournier Caroline Paux (Archives départementales) hommage jean ferrat – la m on t a g ne Paroles et Musique : Jean Ferrat – 1964 « Jean Ferrat - Vol.1 (1999) » Ils quittent un à un le pays Pour s'en aller gagner leur vie Loin de la terre où ils sont nés Depuis longtemps ils en rêvaient De la ville et de ses secrets Du formica et du ciné Les vieux ça n'était pas original Quand ils s'essuyaient machinal D'un revers de manche les lèvres Mais ils savaient tous à propos Tuer la caille ou le perdreau Et manger la tomme de chèvre Pourtant que la montagne est belle Comment peut-on s'imaginer En voyant un vol d'hirondelles Que l'automne vient d'arriver ? Avec leurs mains dessus leur tête Ils avaient monté des murettes Jusqu'au sommet de la colline Qu'importent les jours les années Ils avaient tous l'âme bien née Noueuse comme un pied de vigne Les vignes elles courent dans la forêt Le vin ne sera plus tiré C'était une horrible piquette Mais il faisait des centenaires A ne plus que savoir en faire S'il ne vous tournait pas la tête Pourtant que la montagne est belle Comment peut-on s'imaginer En voyant un vol d'hirondelles Que l'automne vient d'arriver ? Deux chèvres et puis quelques moutons Une année bonne et l'autre non Et sans vacances et sans sorties Les filles veulent aller au bal Il n'y a rien de plus normal Que de vouloir vivre sa vie Leur vie ils seront flics ou fonctionnaires De quoi attendre sans s'en faire Que l'heure de la retraite sonne Il faut savoir ce que l'on aime Et rentrer dans son H.L.M. Manger du poulet aux hormones Pourtant que la montagne est belle Comment peut-on s'imaginer En voyant un vol d'hirondelles Que l'automne vient d'arriver ? printemps 2010 - n°43 - - 5