Histoires d’archives Les Archives départementales racontent... Jouet d’enfant à la fin du XIX e siècle Oh mon doux, si doux mouton ! L e jouet est un objet universel. Dans tous les pays et dans toutes les sociétés, quelle que soit l’époque, les enfants – et les adultes – ont fabriqué ou acquis des objets destinés au jeu. Mais les images anciennes d’enfants des milieux populaires montrés avec des jouets sont rares, dans les Basses- Alpes comme ailleurs. La photographie de cet enfant est donc d’autant plus exceptionnelle. Elle appartient à une série de clichés de femmes, d’hommes et d’enfants pris individuellement ou en groupe dans des cours, souvent devant un drap tendu par le photographe afin de supprimer toute trace du champ photographique. Posé sur un tapis, l’enfant – un garçon – porte la robe qui n’était alors que l’habit long, indifféremment porté au moins jusqu’au milieu du 14 e siècle par les hommes et les femmes. Jusqu’en 1914, tous les garçons, dès qu’ils savaient marcher, ont porté un tel habit. À la taille, une ceinture serre la robe qui recouvre une culotte. L’enfant porte des souliers vernis et très propres alors qu’une dentelle ferme le col de la robe. Mais, le plus étonnant, c’est, posé sur la 18 chaise placée derrière l’enfant, le jouet ! C’est un petit mouton grossièrement fabriqué, sans doute par quelqu’un de la maison ou de la famille. Le mouton, qui appartient probablement à l’univers domestique de cet enfant, est doux : la laine qui le couvre est naturelle. Il tient grâce à ses quatre pattes formées de tiges recouvertes de papier brillant plantées sur un plot. Mais ce « mouton jouet », si évident, en cache un autre ! L’enfant tient en effet dans ses mains ce qui semble être une crécelle, un vieil instrument de musique, dit idiophone car le son est produit par le matériau de l’instrument lui-même. L’enfant en tiendrait dans sa main le manche, seule la partie rotative serait visible sur ce cliché. Un deuxième cliché, pris à une autre occasion, montre l’enfant – au même âge ou presque – devant son père et sa mère endimanchés. Lui est debout, les parents sont assis. Il porte toujours une robe, des souliers montant à lacets. Il n’a plus ses jouets mais il regarde fixement l’objectif du photographe avec le même regard dur. Que pouvait-il alors penser ? Le fonds photographique ColombSur d’autres clichés, une jeune fille, le regard vague, habillée d’une robe sombre, porte un bracelet et un collier où pend une croix ; sur un autre, un garçon en tenue de communiant, avec son chapeau de paille, se tient droit comme un i devant une toile clouée sur la porte d’une grange ; sur un troisième, une jeune femme, vêtue strictement, arbore une étoile de Saint-Vincent, bijou inventé après 1850 par le bijoutier dignois Antoine Colomb. |