Les Archives départementales racontent... gan (1805-18141 Un crime sans assassins l e 12 messidor an Xlii (1 juillet 1805), le gardien du gros bétail de Rougon, Joseph Audibert dit Rose, 45 ans, est retrouvé mort, à " environ une heure et demie de chemin "du bourg. D'après le juge de paix, César Chappier, et l'officier de santé de Moustiers, Pierre Louis Bourrillon, rendus sur place, l'homme a été victime de sept coups portés avec « un instrument tranchant " Le même jour, à Rougon, le juge, qui ne s'est pas déplacé en vain, engage une procédure à l'encontre d'un nommé Imbert, accusé d'avoir maltraité Marguerite Bernard, qui n'aurait pas respecté le• droit d'arrosage ". Ces deux affaires, indépendantes l'une de l'autre, sont rapportées en thermidor au préfet qui a demandé « des détails sur les événements arrivés à Rougon en messidor dernier" Mais, si la procédure contre Imbert est allée à son terme, l'assassinat ne donna pas lieu à des poursuites. Il n'apparatt pas dans les archives judiciaires : point donc de trace. Or, cette affaire aurait normalement dO aboutir à un procès devant la Cour de Justice criminelle du département, siégeant à Digne, au terme d'une instruction préliminaire conduite, depuis la loi du 7 pluviôse an IX (27 janvier 1801) par le juge de paix sous la direction du substitut du procureur ! L'histoire s'arrêterait donc là s'il n'y avait pas un immense tableau, de près de deux mètres de haut, toujours visible à Rougon, peint à l'huile par Joseph Féraud en 1814 et, à l'origine, exposé dans la chapelle Saint-Christophe. C'est un ex-voto, abréviation de la formule latine « ex voto suscepto », littéralement « en conséquence d'un vœu ".Cet ex-voto a été peint pour respecter les dernières volontés de ses deux commanditaires, Bernard Bernard, longtemps adjoint au maire, mort en 1811, et Barthélemy Achard, propriétaire, mort en 1810, et dont les noms sont inscrits sur la toile. Mais en conséquence de quel vœu ? Au centre du tableau, saint Christophe - saint protecteur -, à sa gauche saint Barthélemy - saint patron d'Achard - qui brandit le couteau de son martyre-, à sa droite un soldat romain : saint Domnin, selon une tradition locale, ou saint Expédit, saint patron des plaideurs, expéditeur des affaires délicates en cours de règlement, ou encore saint Pancrace, punisseur des faux serments. À l'article de la mort, Bernard et Achard devaient-ils recourir à l'intercession de ces saints, en commandant un ex-voto hors normes, à l'échelle de leur crime ? Le mystère reste entier. |